Depuis 30 ans, pour réduire les coûts de la santé, les pouvoirs publics ont limité le nombre de médecins, d’infirmières ainsi que les moyens financiers.
À l’hôpital de Gonesse dans le Val d’Oise, une cinquantaine de lits sont fermés faute de personnel. Ces fermetures de lits, récurrentes depuis des mois, désorganisent tout l’hôpital. De scènes en scènes, le film nous plonge dans l’univers souvent absurde et même cocasse dans lequel se débattent les acteurs de l’hôpital —soignants, administratifs— pour que “ça fonctionne” envers et contre tout.
DESCRIPTIF DU FILM
Dans dix ans, cinq ans, l’an prochain, pourra-t-on encore aller en France à l’hôpital public se faire soigner en tout confiance ?
Pour poser cette question, le Centre hospitalier de Gonesse, un hôpital général du Val d’Oise où travaillent 2200 personnes et qui dispose de 1 000 lits. Dans tous les services, le même univers absurde : de la direction aux soignants, continuellement les mêmes questions sans réponse : comment gérer la pénurie d’infirmières et sa kyrielle de fermetures de lits ? Comment faire fonctionner l’IRM sans manipulateur radio ? C’est tous les jours qu’il faut faire des miracles, en ce début 2003.
Cette plongée au cœur de l’institution hospitalière croise deux niveaux de perception de la crise, en suivant plusieurs personnages. D’un côté la direction, en lien avec les décideurs, de l’autre, les soignants en prise directe avec les malades.
Les réunions s’enchaînent à un rythme effréné pour poser des problèmes qui restent sans solution. Les équipes soignantes perdent la majeure partie de leur temps à gérer la pénurie : trouver un lit, un rendez-vous pour un examen urgent, chercher un patient hospitalisé dans le mauvais service, libérer une place le plus vite possible…
Discussions, incompréhension et un même discours : l’hôpital est au bord de la rupture.
Le film raconte cette histoire, sans s’arrêter à la porte d’entrée de l’hôpital —les urgences— mais en allant au-delà, jusque dans les coulisses, jusqu’à l’administration.
CE QU’EN DIT LA RÉALISATRICE
Selon l’organisation Mondiale de la Santé, notre pays reste le premier en matière de soins. Mais pour combien de temps encore ? On sait que les Anglais doivent attendre sept ans une prothèse de hanche. Les Italiens, s’ils en ont les moyens, s’offrent les services d’une infirmière privée pour s’occuper d’eux à l’hôpital public. Les Américains, quant à eux, doivent être riches s’ils veulent rester bien portants ! De la naissance à la mort —nous serons deux Français sur trois à finir nos jours à l’hôpital— nous côtoyons l’hôpital, en confiance. Mais tout laisse à penser que nous sommes aujourd’hui à un tournant. L’hôpital compétent, au service de tous, se trouverait-il remis en question ? L’hôpital public va-t-il pouvoir continuer à assurer sa mission de service public ?
Depuis plus de trente ans, les politiques tentent de contenir le coût de la santé : le numerus clausus pour les médecins, les quotas pour les infirmières et le budget global —le budget des hôpitaux est bloqué et n’augmente que d’un très faible pourcentage par an. La logique de rentabilité a fait irruption dans l’univers de la santé. L’idée sous-jacente est que l’offre crée la demande. Il faut donc réduire l’offre d’infirmières, de médecins... et de lits. Mais la demande continue de croître : la faute aux progrès de la médecine, à l’exigence grandissante de la population, à l’apparition de nouvelles pathologies, à l’allongement de la durée de la vie...
C’est le moment d’aller faire un film, de pointer la logique qui est en place, avec ses conséquences. Montrer le manque d’infirmières, de médecins, de lits, c’était filmer l’administration, les rapports entre les services, les coulisses d’un hôpital. D’un hôpital parmi d’autres.
Au-delà d’un état des lieux de l’hôpital aujourd’hui, le film propose une mise en scène de l’univers absurde dans lequel se débattent les acteurs de l’hôpital —soignants, administratifs, et l’ensemble du personnel— pour que “ça fonctionne” envers et contre tout, en menant une bataille impossible, et peut-être déjà perdue si aucune décision politique n’est prise.
Entre les réunions, caméra à l’épaule nous suivons les soignants dans les couloirs, dans les chambres, passant d’un service à l’autre. Toujours en mouvement. Les médecins, courant et parcourant les services à la recherche de leurs patients, les urgences, en train de chercher des lits dans tout l’hôpital. La pénurie se gère grâce à l’utilisation permanente du téléphone portable d’une part, et de l’autre en arpentant des kilomètres de couloirs dans les différents étages de l’hôpital. On voit donc tout au long du film les médecins, le téléphone collé à l’oreille, le stéthoscope à la main déambuler dans tout l’hôpital à la recherche d’un patient “hébergé” qui n’a pas pu être hospitalisé dans leur propre service, faute de place. Déambulations interminables.
FICHE TECHNIQUE
Réalisation, image : Stéphane MERCURIO
Montage : Françoise BERNARD
Son : Patrick GENET
Ass. réalisation : Lena FRAENKEL
Mixage : Jean-Marc SCHICK
Production : Viviane AQUILLI
Production déléguée : ISKRA
avec la participation de France 2
Avec le soutien du CNC, de la PROCIREP et de l’ANGOA-AGICOA
POUR PROLONGER LE FILM
Les États généraux de la santé et Info Santé sur le site d’ATTAC France
Pratiques, les Cahiers de la médecine utopique, une revue pour comprendre et agir dans les domaines du soin et de la santé